
Zohran Mamdani élu maire de New York : le début du crépuscule du trumpisme ?
Plusieurs victoires d’opposition et un avertissement envers Trump
Cette élection est incontestablement un coup de semonce pour Donald Trump . Certes, New York qui avait voté à 68 % pour Kamala Harris lors de la dernière présidentielle n’est pas l’Amérique. Mais en cette même journée électorale du 4 novembre, les démocrates ont remporté les postes de gouverneur en Virginie avec Abigail Spanberger et dans le New Jersey avec Mikie Sherril, toutes les deux sur ligne centriste. En Californie les électeurs ont aussi entériné par un référendum un redécoupage électoral en faveur des démocrates.
Cette sérieuse série de revers pour les Républicains un an à peine après la victoire de Donald Trump redonne du souffle à un parti démocrate qui était sonné, sans leader ni vraie stratégie, et plongé dans une profonde dépression.
Un Parti démocrate désormais sommé de choisir sa stratégie
Le message des urnes reste contradictoire puisqu’il a primé aussi bien la ligne radicale à New York que celle centriste en Virginie et au New Jersey. Elles sont antinomiques, comme le montrait déjà en 2016 l’affrontement entre Bernie Sanders, le doyen de la gauche, et Hillary Clinton. Faut-il tenter de séduire les indépendants, les déçus du trumpisme comme l’estiment la majorité des élus démocrates ou au contraire défier le mouvement Maga (Make America Great Again) par un populisme de gauche porteur d’une rupture au risque d’effrayer l’électorat modéré ? Il y a urgence à trancher.
Le parti démocrate, avec son leadership vieillissant, a une mauvaise image auprès de 60 % des électeurs, selon une étude du très sérieux institut Gallup. « Paradoxalement pourtant, si le parti reste impopulaire, les démocrates gagnent les scrutins et cela augure bien des élections de mi-mandat l’année prochaine si elles se déroulent de façon honnête » note Ludivine Gilli, directrice de l’observatoire Amérique du Nord à la Fondation Jean Jaurès. Avec ce scrutin une relève générationnelle s’affirme. Les symboles en sont notamment Abigail Spanberger en version centriste forte de sa très large victoire et Zohran Mamdani dans une mouture ultra-radicale, même si ce dernier, né à l’étranger, ne peut être candidat pour la Maison-Blanche.
Ces scrutins sont riches d’enseignement au-delà même des Etats -Unis. Dans sa campagne new-yorkaise, Zohran Mamdani a totalement changé de braquet. Fini les mobilisations autour du genre, de l’identité ou du droit à la différence des minorités. Il a mis en avant un mot qui parle à tous à New York : « affordability » (coût de la vie abordable). Le loyer moyen, à New York, tourne autour de 3 500 $ par mois alors que le revenu moyen se situe à 6 000 $. Il propose de geler les loyers des logements réglementés (environ 40 % du parc locatif de la ville), d’améliorer le réseau de bus et le rendre gratuit, de créer un système de crèches gratuit et d’ouvrir cinq épiceries municipales à prix coûtant. « Je le fais pour que les New-Yorkais puissent élever leur famille dans la ville qu’ils aiment » a-t-il martelé pendant sa campagne. Le programme devrait être financé par de nouveaux impôts sur les plus hauts revenus et patrimoines comme sur les profits des entreprises. Wall Street pousse des cris d’orfraie. Mais si Mamdani est le plus engagé sur ces thèmes, les candidates démocrates qui ont gagné en Virginie comme dans le New Jersey ont aussi joué à fond sur le social et le pouvoir d’achat.
Donald Trump a pas mal de moyens légaux et moins légaux pour mener la vie dure au jeune maire de New York quand il s’installera le 1er janvier au City Hall et menace ouvertement de couper nombre de financements fédéraux. « Le principal obstacle pour la nouvelle équipe municipale sera moins à la Maison Blanche qu’à Albany, la capitale de l’État New York, car il y a nombre de compétences partagées » souligne Ludivine Gilli. D’autant que le parti démocrate hors de la ville de New York avait pris ses distances avec Mamdani et son programme. Ses ennemis au sein du parti ne se privent pas de rappeler ses positions radicales du passé : son refus de condamner le slogan « globalisons l’intifada », ses ambiguïtés vis-à-vis du Hamas ou ses dénonciations d’un « génocide » dès le début de l’opération à Gaza. Autant de critiques qu’il rejette comme « islamophobes ». Il était tout aussi radical dans ses critiques de la police et de ses nombreuses bavures, proposant de réduire les budgets pour les forces de l’ordre même si depuis il a sur ce point aussi lissé son discours, ce qui n’empêche pas Donald Trump de continuer à dénoncer « Mamdani le coco ».
En fait, il sera pour le locataire de la Maison Blanche le plus commode des épouvantails. Aussi bien s’il réussit à mettre en œuvre une partie de son programme « socialiste » que s’il échoue. Donald Trump a bien besoin de remobiliser son camp.





